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auteurMis en ligne par Ignace de Witte le (dernière modification le )

La Diabline

Récit d’un naufrage

Pourtant, tout avait si bien commencé… Saint-Denis est la première commune de La Réunion à avoir mis en place un véhicule 100% électrique pour le transport des personnes en centre-ville. Du 15 décembre 2008 au 24 janvier 2009, une Diabline a relié les parkings de l’Océan et du Grand-Marché en passant, à l’aller comme au retour, par la rue piétonne Maréchal Leclerc, pour la modique somme de 50 centimes, au rythme d’une rotation toutes les 45 minutes environ et surtout qui s’arrêtait devant le magasin de votre choix !

Le maire Gilbert Annette nous expliquait alors: «Nous sommes des praticiens du développement durable, alors que d’autres ne sont que des théoriciens !» L’objectif de la municipalité était d’inciter les automobilistes à laisser leur voiture dans un des deux parkings cités au lieu de tourner en rond en centre-ville pour trouver une place le plus près possible du magasin dans lequel ils veulent se rendre. En complément à la mise en place de cette navette électrique, la municipalité avait instauré la gratuité du stationnement dans les deux parkings concernés à partir de 17 heures (contre 18h auparavant) et convaincu plus d’une centaine de boutiques de rester ouvertes jusqu’à 19h (contre 18h habituellement).

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La diabline dans les rues de Saint-Denis
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La présentation officielle de l’opération
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En tous cas, très colorée !
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Gilbert Annette et deux autres élus
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Visite guidée du véhicule
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Poste de conduite de voiturette de golf
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Vitesse limitée à 50 km/h

Hélas, malgré tous les efforts de la municipalité, le public réunionnais s’est montré modérément convaincu par la Diabline, contrairement aux villes en métropole où un dispositif similaire a été mis en place. Les Réunionnais sont en effet amateurs de belles voitures et la Diabline n’est pas très sexy: si certains y voient le «car courant d’air» du 21e siècle, d’autres, moins poètes y voient plutôt le résultat de l’accouplement d’une voiturette de golf avec un camion de vendeur de glaces ! Mais il semblerait que le frein était aussi technologique: en raison de sa faible autonomie, la navette ne fonctionnait que de 10h à 12h30 et de 15h30 à 18h30, car les batteries devaient être rechargées pendant la pause de midi.

La Diabline est en effet équipée de 8 batteries plomb-acide de 6 volts chacune, du type de celles que l’on trouve sur les chariots élévateurs. Les 8 batteries pèsent 250 kg. Elles sont placées dans un coffre, sous la banquette adossée à la cabine conducteur. Le principal avantage de ces batteries est leur prix: 250 € pièce, soit le pack de 8 pour 2000 € alors que l’équivalent en lithium-ion coûte 6 fois plus cher. Les 8 batteries de 6 volts en série fournissent le courant en 48 volts nécessaire au moteur de 6 kW monté sur le train arrière. La puissance n’est pas phénoménale et la Diabline ne dépasse pas les 50 km/h en vitesse de pointe, mais c’est cohérent avec son usage limité au centre-ville.

2011: le retour

Nous avons quand même été surpris deux ans et demi plus tard d’été invités cette fois-ci par Fabienne Couapel (vice-présidente de la Région Réunion) et Jismy Souprayenmestry (Agence de Développement de la Réunion) à découvrir un «nouveau véhicule» qui n’était autre que… notre Diabline, du moins un exemplaire identique, avec une déco plus sobre !

Surtout, le projet qui nous est alors présenté est d’une toute autre dimension: créer à La Réunion un atelier de montage de Diabline, qui arriveront en pièces détachées de métropole, atelier qui assurera aussi la maintenance. Helem OI sera une filiale de la S.A. Helem dont le siège est en métropole et dont un des associés, Sébastien Kulak, est originaire de La Réunion. Plus précisément, Helem OI sera une co-entreprise (50-50) entre Helem de métropole et l’entreprise locale Convergence de Dominique Vienne, une entreprise spécialisée dans l’optimisation de la consommation d’énergie, donc déjà branchée «écologie».

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2011: le retour de la Diabline
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Fabienne Couapel Jismy Souprayenmestry
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Sébastien Kulak
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Les promoteurs du projets annoncent que l’atelier de montage de La Réunion va voir le jour en 2012 ou 2013, que les collectivités locales ont déjà pré-commandé une vingtaine d’exemplaires et que l’entreprise a le projet à 5 ans de se développer à l’export: Maurice, Mayotte, l’Afrique du Sud et même l’Australie…

2014: mise en redressement

Le projet Helem OI nous semblait alors très ambitieux, pour ne pas dire trop, compte-tenue de l’expérience peu concluante de 2008-2009 mais aussi en raison de la Diabline elle-même. En effet, cet engin a été mis au point en 2000 par Claude Fior, un concepteur-développeur de grand talent que connaissent tous ceux qui suivaient le championnat du monde de moto 500cc dans les années 80. Claude Fior (Pif pour les intimes) a mis au point plusieurs parties-cycles motos, dont certaines avec un système original de suspension avant par double triangle (et pas par fourche télescopique). Ce Gascon (né à Nogaro), a également conçu des châssis de voitures de course: les monoplaces de l’école de pilotage du circuit de Nogaro, la Renault Formule Campus, etc. sans oublier sa participation au développement du remarquable Renault Sport Spider et de la rarissime moto Lamborghini 1000 cc.

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Claude Fior et sa 500 GP
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La Renault Formule Campus
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Le Renault Sport Spider
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Moto Lamborghini 1000 cc

Hélas, le génial Claude Fior est mort accidentellement le 13 décembre 2001, aux commandes d’un petit avion de tourisme.

L’entreprise se bat pour survivre

Son fils, Fabien, et un ingénieur de Fior Concept, Jean-Luc Gallier, ont essayé de poursuivre l’activité et au début ils réussissent même à la développer, en fabriquant des répliques de la F1 championne du monde d’Alonso, en assurant la restauration de voiture de courses de collection, etc. L’entreprise quitte ses locaux historiques en bordure du circuit de Nogaro pour emménager vers des locaux plus vastes (5000 m2) à Auch. Mais Fabien Fior revend ensuite ses parts, pour s’occuper d’une écurie de course en Chine (Dynatem Motorsports) et Jean-Luc Gallier s’associe alors avec un ingénieur comme lui: Sébastien Kulak.

Ensemble, ils fondent en janvier 2010 la S.A. Helem. Les collectivité locales suivent mais les banques sont moins enthousiastes. Finalement, l’entreprise est placée en redressement en 2014 et liquidée en 2016. Certains pointent du doigt le fait que les chefs d’entreprise avec une formation purement technique ont souvent (toujours ?) du mal à se faire comprendre des banquiers. D’autres soulignent que la Diabline a été mise au point par Claude Fior en 2000, un an avant sa disparition. Il a conçu un châssis exceptionnel (sa spécialité): grâce aux panneaux sandwich en feuille d’aluminium de 1,5 mm d’épaisseur, collés et rivetés (technique aéronautique), le poids à vide de cet engin homologué pour le transport de 8 personnes est de seulement 545 kg (sans les batteries). Vous pouvez vérifier: la Diabline n’a aucun concurrent à ce niveau.

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Abandonné dans un coin de la Nordev
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Rétroviseurs arrachés
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Roue crevée

Par contre, question motorisation, Claude Fior n’a peut-être pas eu le temps de finaliser l’engin: esthétiquement, la Diabline n’est déjà pas sexy mais avec son moteur électrique de 6 kW (puis plus tard 8 kW), ses performances ne le sont pas non plus, surtout l’autonomie (60 km).

La Diabline abandonnée

La Diabline, conçue en 2000, était donc, à notre humble avis, hors jeu en 2008, et encore plus en 2011. Ça, à l’époque, la presse s’est bien gardée de l’écrire, pour ne pas froisser les collectivité locales qui soutenaient le projet (car ce sont des annonceurs importants) et/ou parce que tout ce qui est un peu technique leur échappe ! Aux dernières nouvelles, la Diabline de Saint-Denis pourrie dans un coin de la NORDEV.


11 novembre 2021: le naufrage de la Diabline n’a heureusement pas entraîné dans son sillage celui de notre ingénieur réunionnais: Ségastien Kulak a poursuivi le développement d’un nouvel engin, plus performant (Colibus) et il dirige surtout une entreprise qui développe une voiture de course 100% électrique et qui intéresse beaucoup les petits circuits automobiles en métropole, qui sont de plus en plus confrontés aux riverains qui se plaignent du bruit.

Diabline de Fior Concept
Longueur3790 mm
Largeur1520 mm
Empattement2345 mm
Porte-à-faux avant880 mm
Porte-à-faux arrière635 mm
Pneus145/70 R 13
Poids à vide SANS batteries545 kg
Poids à vide AVEC batteries890 kg
Poids Total Roulant1500 kg
8 places2 à l’avant (dont conducteur)
3+3 derrière
Motorisation
Puissance6 kW (8 kW)
DispositionSur l’essieu
arrière
Batteries8x6= 48 volts
Autonomie60 km
PermisB

 # politique des transports   # électrique⚡ 

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